Tuesday 7 June 2011

Sembène : l’éternelle leçon

Il fallait bien qu’un livre soit publié en hommage à Sembène Ousmane. Il y en a eu d’autres certes, mais celui qui vient de paraitre en ce début de 2009 publié par l’association Africultures chez l’éditeur L’Harmattan est bien particulier. Moins de deux ans après la disparition, en juin 2007, du cinéaste et romancier sénégalais, ce livre vient rendre un hommage digne de sa valeur.
L’équipe qui se cache derrière cette initiative a bien tenu le pari. On savait qu’à l’occasion du fespaco (février dernier) un hommage allait être rendu à Sembène. Le livre aura été au rendez-vous. Une effigie grandeur nature lui aura été érigée sur la place des cinéastes de la capitale du Burkina Faso. La même ville éternisera son nom en baptisant l’une de ses grandes artères en son nom. Qu’y a-t-il de mieux pour saluer un romancier et un cinéaste qu’un livre ! C’est toute l’idée de ce projet. Simple symbolique, mais surtout digne.
Coordonné par Thierno Ibrahima Dia, universitaire et critique de cinéma sénégalais basé à Bordeaux, le livre fait intervenir plusieurs plumes. Objectif, essayer de cerner la vie et l’œuvre de celui qui aura marqué l’histoire et la culture africaine et mondiale. Les différentes contributions paraitront à l’évidence comme une multiplicité de regards, autant les facettes du personnage sont difficile, voire même impossible à cerner.
Intitulé tout simplement Sembène Ousmane (1923-2007), le livre dit beaucoup sur son sujet. Il contient des témoignages de ceux qui auront connu Sembène de près. Ce sont des collaborateurs comme Clarence Thomas Delgado. Ce sont des écrivains qui ont été témoin de la gestation de son œuvre littéraire comme Boris Diop. Ce sont des universitaires qui connaissent son œuvre et l’enseigne en guise de reconnaissance Keyan G. Tomaselli, Sada Niang, Maguèye Kassé. Ce sont des critiques de cinéma qui ont accompagné ses films par le monde entier tel Virginie Andriamirado, Giuzeppe Gariazzo, d’autre qui avaient appris beaucoup sur son art en assistant à ses leçons de cinéma comme Thierno I. Dia qui rend compte de la rencontre de Dakar 2004 ou Olivier Barlet rapportant le contenu de la célèbre leçon donnée du haut de la tribune du festival de Cannes 2005.
Par le roman ou par le cinéma, Sembène aura été celui qui aura donné la parole à l’Afrique. Non seulement il puise dans son imaginaire qui prend ses racines dans Casamance, cette région du Sud du Sénégal qui devint le centre du monde, mais son engagement ira jusqu’à vouloir imposer la langue wolof comme langue de littérature. Il en a été de même au cinéma. Après un début en langue française Borom Sarret et La noire de… qui le propulsent sur la scène internationale du septième art, il s’engage dans un travail titanesque de revalorisation des langues locales comme bastion de lutte pour la cause de la culture africaine.
Jusqu’au dernier élément de sa filmographie Sembène aura tenu ce cap : porter l’Afrique sur les scènes du monde. C’est dans ce sens que Molaadé, son dernier film a été compris en tout cas. Son dernier projet portait le nom de Samoury, le film dont il a toujours rêvé et qui devait éterniser l’un des symboles de l’Afrique combattante. Il l’aura laissé comme testament à la postérité pour qu’elle le concrétise. Il aura laissé certes une œuvre encore plus riche. Mais il aura laissé surtout un souffle que les jeunes générations pourront découvrir dans ses films ou dans ses romans. Pour cela, il est peut-être temps que l’école, que Sembène a connue d’une manière inhabituelle, fasse de la place à « l’ainé des anciens ». Il aura pour toujours des leçons à donner et des meilleures…

http://www.scribd.com/doc/57276456/Sembene-Ousmane-1923-1007

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